L’envolée du prix du nickel au premier semestre 2014
Malgré l’absence de sérieuse menace sur l’approvisionnement en minerai de nickel en début d’année, les prix ont néanmoins grimpé dès la mise en place de l’embargo, en janvier 2014. Le conflit entre l’Ukraine et la Russie - qui produit 12 % de la production mondiale de nickel métal – a accéléré la remontée des cours en mars. Finalement, une nouvelle interruption de la production de l’usine hydrométallurgique de Goro (Vale) en Nouvelle-calédonie en mai 2014, a amené les cours du métal jusqu’à 21 200 US$/t (13 mai 2014, prix au comptant), correspondant à un plus haut depuis mars 2012 et une hausse de 52 % par rapport au début de l’année 2014. Et ceci, malgré l’impact très limité de Goro sur la production globale de 2 Mt de nickel.
Les cours chutent au cours du second semestre 2014
Le prix du nickel a fini l’année à 14 935 US$/t, soit une chute de 30 % depuis son plus haut en mai 2014. Deux facteurs principaux ont contribué à la chute des cours au second semestre :
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La réalisation que les risques sur l’approvisionnement en minerai de nickel resteront faibles en 2014 et encore au 1er semestre 2015
Le déstockage de minerai indonésien se poursuit au second semestre 2014, mais le niveau des stocks dans les ports chinois se stabilise car ce déstockage est compensé par une recrudescence des importations de latérites nickélifères des Philippines, favorisée par des prix soutenus et la fin de la mousson, à partir de juin 2014. En mélangeant le minerai philippin, de moindre qualité, au minerai indonésien, la production chinoise de fonte de nickel (Nickel pig iron - NPI) s’est au final maintenue à un niveau élevé.
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La hausse des stocks du métal au LME engendrée par le scandale financier de Qingdao
Les stocks de nickel au LME ont grimpé d’environ 60 % de janvier 2014 à mars 2015. 432 996 tonnes de nickel étaient stockées dans les entrepôts du LME à la fin du mois de mars 2015, un plus-haut historique, correspondant à 23 % de la demande mondiale du métal (1,87 Mt en 2014, donnée INSG, avril 2015). L’envolée des stocks ne reflète pas les fondamentaux du marché mais résulte du transfert de volumes importants de stocks chinois vers les entrepôts de LME en Malaisie, suite à la fraude financière de Qingdao révélée en mai 2014 (La fraude consistait à réutiliser les mêmes stocks de matières premières comme garanties à des financements bancaires). La Chine est ainsi devenue un exportateur net de nickel pour la première fois depuis de nombreuses années.
Situation et prospective en 2015
Les cours du nickel ont plongé en avril 2015 (12 260 US$/t le 14 avril 2015), touchant leur niveau le plus bas depuis mai 2009, sur un fond de surplus et d’incertitudes liées à la demande du secteur de l’acier.
Ce n’est qu’au second semestre 2015 que les effets de l’embargo devraient se faire ressentir sur la production de NPI, car les stocks de minerai indonésien devraient s’épuiser en milieu d’année. Environ 60 % de ces stocks entreposés dans les ports chinois en janvier 2014 (18 à 25 Mt selon les sources) auraient déjà été consommés à la fin 2014, soit au rythme d’environ 1 Mt/mois. La production de NPI, déjà affectée en 2014 par des coûts de production élevés et la fermeture de fonderies polluantes, devrait donc diminuer de manière très significative en 2015.
Cependant, le tarissement de minerai indonésien ne se traduira pas forcément par une hausse des cours du nickel. En effet, les sidérurgistes chinois utilisent beaucoup plus de ferronickel dont les importations ont bondi de 45,2 % à 282,9 kt t en 2014 (En provenance essentiellement de Nouvelle-Calédonie et de Birmanie ). Par ailleurs, les importations de nickel ont repris en 2015, l’effet Qingdao s’atténuant. Enfin, des fours électriques chinois programmés sont déjà en construction en Indonésie pour produire du NPI sur place qui sera alors exportable.
Maïté Le Gleuher, BRGM